Des expositions
La décennie turbulente
Première exposition consacrée au photographe Josep Andreu Puig Farran, au centre KBr de la Fondation MAPFRE.
Les images reflètent la réalité du moment, mais il serait naïf de penser qu'elles ne la construisent pas aussi. Surtout lorsqu'elles apparaissent dans la presse, illustrant un événement ou témoignant de faits précis : il est très facile de les lire comme la preuve graphique d'une réalité donnée, comme la preuve de l'histoire qu'elles accompagnent. Il s'agit d'une routine interprétative que nous avons bien intégrée, mais dont il est conseillé de se distancier pour se rapprocher des faits.
Joan Andreu Puig Farran, Be resistint-se. Fira del Xai al passeig de Sant Joan, durant la celebració de la Pasqua, abril del 1934. Arxiu Fotogràfic de Barcelona / Arxiu Família Puig Farran. © Arxiu Família Puig Farran
C'est précisément cet exercice de distanciation que nous proposent les commissaires de l'exposition Joan Andreu Puig Farran : la décennie turbulente (1929-1939) dans l'espace KBr de la Fondation Mapfre. À l'occasion de la première exposition consacrée à l'un des grands noms du photojournalisme en Catalogne — composée d'une sélection de plaques de verre déposées par ses héritiers aux Archives photographiques de Barcelone, complétée par un grand nombre d'exemplaires originaux conservés dans les fonds documentaires du journal La Vanguardia —, Arnau Gonzàlez i Vilalta et Toni Monné Campañà ont conçu une exposition qui vise à démanteler les récits individuels de la presse du moment pour souligner les biais et les contradictions d'une société tendue entre le désir de transformation et la préservation des valeurs traditionnelles.
Joan Andreu Puig Farran, Atleta participant en una de les proves organitzades pel club FAEGE, Barcelona, 1930-1936. Arxiu Fotogràfic de Barcelona / Arxiu Família Puig Farran. © Arxiu Família Puig Farran
Bien que l'exposition comprenne une série de journaux de l'époque où les photographies ont été publiées à l'origine, la traduction des images de Joan Andreu Puig Farran dans le format de l'exposition aspire à multiplier les niveaux de lecture des représentations qui ont servi à construire non seulement une vision particulière du moment, mais aussi désormais la mémoire collective de ce qui fut une décennie aussi tumultueuse que celle qui s'est déroulée de 1929, avec l'Exposition internationale de Barcelone et sa modernisation conséquente, jusqu'à la fin de la guerre civile, en 1939.
Joan Andreu Puig Farran, El cuirassat Asama de la Marina Imperial japonesa arriba al port de Barcelona procedent de Marsella, 27 de maig del 1934. Arxiu Fotogràfic de Barcelona / Arxiu Família Puig Farran. © Arxiu Família Puig Farran
Isolés de leurs contextes communicatifs originaux respectifs et disposés avec une intention spécifique qui cherche à découvrir la friction des différentes réalités qui coexistent à la même époque, les instantanés de Puig Farran nous invitent à aborder ce moment de l'histoire du pays à partir d'une nouvelle perspective qui intègre des cartes postales opposées comme la construction, d'une part, de la Sagrada Família d'Antoni Gaudí, et d'autre part, la destruction iconoclaste, de l'autre, de l'église de Betlem de les Ramblas au début de la guerre civile ; ou le don de pain et de riz aux pauvres pendant la festa major dans le quartier de Gràcia et le consumérisme de Noël dans le grand magasin Can Jorba, juste à côté de la Plaça de Catalunya.
Joan Andreu Puig Farran, Nena polonesa, 9 de juny de 1935. Arxiu Fotogràfic La Vanguardia © Arxiu Família Puig Farran
