L'exposition Soulmate, organisée par Zsolt Petrányi , chef du département d'art contemporain de la Galerie nationale hongroise, peut être visitée au NEO Budapest du 29 mai au 7 septembre 2025. Il s'agit d'une collaboration entre le Musée des Beaux-Arts, la Galerie nationale hongroise et Carl Kostyál , et nous plonge dans l'univers coloré et expressif de l'artiste hongrois Szabolcs Bozó , dont les créatures animales sont pleines de vie, d'humour et d'émotion.
À première vue, ses œuvres semblent simples : des animaux souriants aux grands yeux et aux couleurs vives, comme s'ils sortaient tout droit d'une série de dessins animés. Cela a conduit son art à être associé à ce que certains appellent le « mignonisme », un style qui se nourrit d'une esthétique enfantine. Mais réduire sa peinture à ce qui est « mignon » ou « adorable » revient à rester superficiel. Bozó s'inscrit dans une tradition artistique bien plus profonde, qui traverse des siècles d'histoire de l'art. Depuis des millénaires, les artistes utilisent les animaux pour parler de nous-mêmes. Dans la tradition japonaise, les célèbres rouleaux Chōjū-giga du XIIe siècle représentent des grenouilles et des lapins dans des situations humaines, comme des combats ou des célébrations. En Europe, des figures comme Bosch ont représenté des créatures grotesques pour critiquer les péchés et les peurs de la société. Plus tard, Goya a donné forme à des animaux chargés d'anxiété ou d'ironie, créant des univers dérangeants mais profondément humains.
Au cours du XXe siècle, les animaux aux traits humains sont devenus courants dans les contes pour enfants, mais des artistes ont également exploré leur dimension émotionnelle. En Hongrie, Dezső Mokry-Mészáros a imaginé des êtres heureux sur des planètes lointaines, tandis que Menyhért Tóth a créé des portraits animaliers qui exprimaient l'âme humaine. Ces œuvres allaient bien au-delà du décoratif : elles étaient des métaphores visuelles de nos sentiments et de nos relations. Bozó poursuit cette ligne, mais avec une perspective contemporaine. Il évoque souvent son enfance, les dessins animés hongrois qu'il a vus ou les personnages qu'il a dessinés sur des serviettes en papier lorsqu'il travaillait dans l'hôtellerie-restauration à Londres. Au départ, ce n'étaient que des gribouillis personnels, faits pour le plaisir. Mais lorsqu'il a décidé de les agrandir et de les peindre en grand format, ils ont pris une autre dimension. La taille leur a donné de la force. Les personnages n'étaient plus de mignons petits croquis : ils étaient des protagonistes. Leurs visages, leurs gestes exagérés, occupaient toute la toile, la débordant presque. Un exemple frappant est « Ours dansants », une œuvre où deux ours lilas apparaissent en train de danser ensemble. À première vue, c'est drôle et joyeux. Mais la façon dont leurs corps se rencontrent et dont leurs expressions se connectent donne naissance à une scène tendre, presque intime. Bozó parvient à faire passer un moment apparemment innocent pour un message plus profond.
Bien que dans ses premières œuvres, Bozó se concentrait sur une seule figure par tableau, ces dernières années, il crée des compositions plus riches, mettant en scène plusieurs personnages. Ce sont des situations pleines de mouvement, où les animaux interagissent, se croisent, partagent l'espace. On y retrouve dynamisme, humour et une certaine tension émotionnelle. Les scènes semblent illustrer des rencontres inattendues ou des situations partagées entre inconnus, comme si tous les personnages étaient contraints de résoudre quelque chose ensemble.
Le titre de l'exposition, Âme sœur, est tiré d'une de ses œuvres. Un autre artiste y a écrit ce mot à propos d'un personnage de Bozó , et ce geste spontané a donné lieu à une nouvelle lecture. Ses créatures, avec leurs yeux ouverts et leurs gestes exagérés, ne nous font pas seulement sourire : elles nous invitent à la connexion. Elles nous rappellent les peluches avec lesquelles nous jouions enfants, ces « âmes sœurs » avec lesquelles nous partagions émotions, histoires et secrets. Ce lien émotionnel est essentiel dans l'art de Bozó . Ses peintures nous évoquent l'enfance, l'imaginaire, le désir de vivre dans un monde plus doux. Ses animaux ne sont pas seulement mignons : ils sont des portraits de nos sentiments, de nos relations avec les autres, de ce qui nous manque.
À NEO Budapest , l'univers de Bozó nous enveloppe. Ses créatures nous regardent, nous interpellent et semblent nous inviter à passer de l'autre côté, dans leur monde. Un monde joyeux, certes, mais aussi chargé de questions, d'émotions et de souvenirs partagés.