L'exposition Ría de l'artiste Jorge Satorre marque sa première exposition personnelle dans une institution espagnole et se présente comme une immersion subtile et profonde dans une pratique artistique qui transcende les frontières entre les disciplines. À travers un langage hybride mêlant dessin, sculpture et récit matériel complexe, Satorre construit une proposition qui transcende l'accumulation d'œuvres pour devenir une expérience interprétative ouverte et évocatrice.
Ría ne se présente pas comme un parcours linéaire, mais plutôt comme un espace où éléments formels et conceptuels dialoguent à une cadence silencieuse mais puissante. Les pièces présentées dans l'exposition – certaines produites spécifiquement pour l'occasion – puisent souvent dans des références historiques ou territoriales spécifiques, mais sont reformulées avec une sensibilité privilégiant la transformation à la représentation. L'œuvre de Satorre habite ainsi un territoire intermédiaire, où l'objet artistique se charge de mémoire sans pour autant renoncer à son potentiel de réinvention : être réimaginé, décontextualisé et, surtout, réinterprété.

L'une des caractéristiques distinctives de sa pratique réside dans l'utilisation du dessin non pas comme esquisse préparatoire, mais comme outil de réflexion. Dans son œuvre, le dessin fonctionne comme un moyen de recherche, d'enregistrement, de spéculation et de construction de sens. Parallèlement, la sculpture acquiert une dimension narrative : les formes tridimensionnelles non seulement occupent l'espace, mais aussi l'activent, le déplacent et le redéfinissent.
La proposition curatoriale développée par Latitudes ne se présente pas comme un cadre explicatif fermé, mais amplifie la poétique de Satorre en soulignant les tensions, les silences et les ambiguïtés présents dans son œuvre. Loin de proposer une lecture unique, le commissariat ouvre de multiples pistes d'interprétation et transforme l'exposition en un espace d'activation sensorielle et intellectuelle.
Ría peut être comprise, en ce sens, comme une cartographie d'idées et de formes en transit. Un paysage conceptuel qui invite le spectateur non seulement à regarder, mais aussi à lire entre les lignes, à découvrir des connexions invisibles, à tracer ses propres pistes d'interprétation. L'exposition n'impose pas de récit, mais en suggère un, et c'est précisément dans ce geste que réside une grande partie de sa puissance.

Cette première exposition personnelle institutionnelle de Jorge Satorre en Espagne non seulement consolide sa carrière internationale, mais met également en lumière une démarche qui allie recherche, subtilité et intelligence critique. Ría est, en définitive, une invitation à observer attentivement et à penser librement.
Cette visite de Ría de Jorge Satorre, visible jusqu'au 31 août, couvre la période de l'artiste de 2013 à 2025, marquant un processus d'introspection où Satorre ajuste la distance entre formes visuelles et références personnelles et collectives. L'exposition s'articule autour d'une progression conceptuelle qui guide le visiteur tout au long du parcours. Le point de départ est marqué par des pièces telles que Triplay , un ensemble de portes battantes conçues spécifiquement pour le hall d'entrée, qui fonctionnent presque comme un seuil symbolique à l'exposition. Au fil de l'exposition, le récit visuel et matériel devient plus introspectif et lié à l'expérience personnelle de l'artiste, atteignant des œuvres telles que la fresque Ricardo et le dessin Río, ría . Ces derniers sont directement liés à son récent déménagement de Mexico à Bilbao et fonctionnent comme des évocations du paysage atlantique qui donne sens et titre à l'exposition. Dans cette transition entre structurel et intime, matériel et symbolique, l'exposition trace un récit sensible sur le déplacement, l'appartenance et la transformation.